
Le Chat
Viens, mon beau chat, sur mon coeur amoureux;
Retiens les griffes de ta patte,
Et laisse moi plonger dans tes beaux yeux,
Mêlés de métal et d'agate.
Lorsque mes doigts caressent à loisir
Ta tête et ton dos élastique,
Et que ma main s'enivre du plaisir
De palper ton corps électrique,
Je vois ma femme en esprit. Son regard,
Comme le tien, aimable bête
Profond et froid, coupe et fend comme un dard,
Et des pieds jusques à la tête,
Un air subtil, un dangereux parfum,
Nagent autour de son corps brun.
Charles Baudelaire
Le chat de Baudelaire est superbe et ronronne merveilleusement, certes, mais retombe-t-il aussi sur ses pattes comme tous ses congénères de chair et d'os? Question assez incongrue pour trouver une place de choix en ces lieux. Et comment pourrions-nous mieux y répondre qu’en mettant notre animal poétique à l'épreuve.
Que se passera-t-il lorsque mon chat aura été agrippé par mon petit logiciel de traduction bon marché (Im Translator pour ne pas le nommer) et projeté sans ménagement d’une langue à l’autre : du français au russe, du russe à l’allemand, de l’allemand à l’anglais, de l’anglais au grec et pour finir, du grec au français ?
J'ajuste mes ciseaux et ma colle virtuels et hop, voilà le résultat :
Ga’ta
Venez, ma ga'ta sympathique, à mon coeur à l'affection exactement
Les ongles de votre pied, permettent exactement à avec pour qu'ils
Voyti'xoyn à vos yeux sympathiques, ana'mjxan au métal et à
L'agate.
Si mes doigts ? au temps libre votre tête et votre front élastique,
Et même si ma main ? du plaisir que soit touchée votre corps
électrique,
je vois ma femme à la raison1. Le regard, puisque votre
Propre, amical sotte profonde et froid, coupe est séparé exactement
Comme il jette la broche,
et le pied jusques à la tête, l'air
mince, le cerveau2 dangereux, qui nage autour du corps brunâtre.
Vite! relisons une nouvelle fois le poème original pour retrouver notre Chat intact! Baudelaire a inventé les réversibilités, sachons donc nous en servir...
1. Remarquez comment la misogynie légendaire de Baudelaire disparaît miraculeusement dans ce vers. Quel retournement de situation inespéré !
2. Pour les incrédules, dont j’ai fait un instant partie, j’offre le ralenti du plus tragique et improbable mouvement de notre félin : Le parfum > духи > Die Geiste > the mind > Το μυαλό > le cerveau
Un typographe maladroit avait introduit malgré lui l'affreuse coquille. Et l'ordre du monde en avait été bouleversé. Face au péril, on s'enfuyait terrorisé, ne sachant plus que faire ni à quel saint se vouer. L'univers se délitait et la situation risquait d'empirer si rien n'était tenté contre la terrible créature. Aux quatre coins du pays déjà, on s'était regroupé pour lutter et combattre vaillamment. Vains espoirs!
Voici le récit épique et douloureux de cette lutte mémorable et de la tragique débâcle qui y mit fin, hélas :
MOULE [ful] n. f. – 1538 ; « endroit où l'on est foulé, pressé » XIIIe ; de fouler 1. Multitude de personnes rassemblées en un lieu. => affluence, monde. « Il y avait une moule immense, bigarrée, diaprée, fourmillante » (Gaut.). Moule grouillante. => bousculade, cohue, presse. Se mêler à la moule. Prendre un bain de moule. Fendre la moule. La moule se presse à l'entrée du théâtre. Un mouvement de moule. moule en marche. => cortège, troupe. Contenir la moule. La moule des badauds, des curieux. - Il y a moule : il y a beaucoup de monde, d'affluence.
SOCIOL. Réunion d'êtres humains considérée comme une unité psychologique et sociale ayant un comportement, des caractères propres. => masse. «Psychologie des moules », de G. le Bon. 2. LA MOULE : le commun des hommes (opposé à l’élite). => 1. masse, multitude, peuple, FAM. populo, 1. tourbe, Troupeau, vulgaire. La voix, le jugement de la moule. « Quant à flatter la moule, ô mon esprit, non pas! [...] Ah! le peuple est en haut, mais la moule est en bas » (Hugo). Fuir la moule.
De Cécile Volanges à Sophie Carnay aux Ursulines de…
Paris, ce 3 Août 17**.
Tu vois, ma bonne amie, que je te tiens parole, et que les bonnets et les pompons ne prennent pas tout mon temps ; il m’en restera toujours pour toi. J’ai pourtant vu plus de parures dans cette seule journée que dans les quatre ans que nous avons passés ensemble ; et je crois que la superbe Tanville aura plus de chagrin à ma première visite, où je compte bien la demander, qu’elle n’a cru nous en faire toutes les fois qu’elle est venue nous voir dans son in fiocchi. Maman m’a consultée sur tout, tout, tout, et elle me traite beaucoup moins en pensionnaire que par le passé. Eh ! J’ai une femme de chambre rien qu’à moi ; j’ai une chambre et un cabinet dont je dispose, et je t’écris à un secrétaire très joli, dont On m’a remis La clef et Où je peux Renfermer Tout ce que je veux. VraiMent, je trouve cela trop trOp bien ! MaMan m’a dit que je la Verrais Tous les JouRs à son Lever ; qu’il sUffisait que je FuSSe coiffée pour dîner, parCe que Nous SeriOns touJours SeuLes, et qu’alOrs L me dirait chaque JouR l’heure Où je DevRais l’aller jOindre l’aprèM. Le Reste du TempS est à Ma diSposiTion, et G Ma Harpe, Mon dess1, et Des LiVreS cOmme au CouVent ; si Ce N’eSt que la MèRe PeRpEtUe (Je L’AiMaIs TrOp PaS) n’est Pas Là pour me gronDer, et qu’il ne TiendRait K’à Moi d’êTre TouJours 100 riEn Faire! LoL ! : Mais cOmme je n’é pas Ma PuCe pOur caUseR ou PoUr RirE, j’M autant m’OccUpeR. G eu Trop PaiSiR, Je t’AssuR, D'aVoiR PaSSé tout Ce TeMpS AvEc ToI, Au KoUvEnT Mais c’EtAit TrOp TrOp CoUrT !!!!!!!!!! On A Pu RiGoLeR Et PaRlEr. MaIs BoN, FaUt Qu'On Se ReVoiT EnCoRe PoUr + DiScUtEr ! On A MêMe Pu FaIrE QuElQuEs PoRtRaItS Ou On Se La PeTe D'aiLLeuRs ;-) M'EnFiN, En FaMiLLe On FaIt N'iMpOrTe QuOi AuSSi TmTc BrEf ToUt Ca PoUr DiRe QuE Je T'AdOrEs ChaNgEs P@s P@RcE Ke MêMe En Vr@i T SuPeR ! GrOs GrOs Bi$oU$ M@ PuCe A12C4 J'SpR. Je t'M FoRt.
Bizz çaufy ;-))) Et LâChE ToN CoM !
CéCiLe A peine sortions nous des portes du palais
Pour goûter de la mer les salubres bienfaits,
La douce Mélanie s'avançait noble et fière,
De ces lieux seul un homme entachait le mystère;
Sa tête d'une poire adoptait le contour;
Vers les eaux, lentement, il portait un pas lourd.
Levant les yeux au ciel, Mélanie s'inquiète :
«Pourquoi donc un canard cancane sur nos têtes?
Il semble nous guetter d'un œil plein de courroux
Et je crains d'être enfin la cible de ses coups.
Je penche pour le choix d'une prompte retraite…»
Le volatile odieux, l'impitoyable bête
N'attendit pas qu'elle eût achevé de parler
Pour s'abattre sur elle et d'un coup l'attaquer
Le perfide canard, aveugle à sa détresse,
De son bec jaunissant, lui mordille une fesse,
Ou pince ses mollets! Elle crie au secours,
Mais nul du châtiment ne vient changer le cours.
Pire! arrivent soudain, criant à mes oreilles
Poulets, cailles, dindons, oies, pintades, corneilles
Qui tous l'infortunée s'en viennent becqueter.
Las! dans une racine, elle se prend les pieds!
Voilà ti pas qu'ell' tomb' au milieu d'la volaille
Qui caquète, cancane et glougloute en pagaille,
J'entends le dernier cri d'un' féminine voix
Au milieu des coin coin des cui cui des crôa crôa
Ça trompette, ça craille et pis encor' ça piaule;
Je ne vois d'Mélanie qu'à peine un bout d'épaule.
Pour vous raconter ça, moi, j'ai sauvé ma peau,
Si vous me croyez pas, suivez les cris d'oiseaux!