Il aurait pu s’appeler L’extravagant vacarme, L’affolant foutoir ou Le fabuleux fouillis mais L’inouï tintouin était un bibelot verbal ô combien plus attrayant. J’empoigne mon scalpel, mes pinces, mes ciseaux et commence l’analyse du titre de ce blog.
Selon le Petit Robert, le tintouin désigne un grand vacarme, un bruit fatigant. Il ne peut donc pas se lier à l’inouï sans engendrer une figure paradoxale, un oxymoron étymologique. En effet, si l’adjectif inouï est aujourd’hui synonyme de prodigieux et d’extraordinaire, il signifie d’abord que l’on n’entend pas. L’inouï tintouin, c’est donc, littéralement, un bruit que l’on n’entend pas. Ou alors un silence qui gronde.
Graphiquement ensuite - les amateurs de scrabble se régalent - inouï s’inscrit parfaitement à l’intérieur de tintouin alors que le lien reste très discret d’un point de vue phonique en raison de la diphtongaison. Or, cette fusion, ou plutôt cette confusion, entre l'existence et l'inexistence d'un son, ne rappelle-t-elle pas l’acouphène, sifflement ou bourdonnement d’oreille qui n’est lié à aucune onde acoustique réelle ?
Attention, c’est à cet instant que les mots vont témoigner de richesses insoupçonnées. Le respecté dictionnaire de Pierre Furetière, la référence du XVIIème siècle, définit justement le tintouin comme la « sensation trompeuse d’un bruit analogue à celui d’une cloche qui tinte, et dû à un état morbide du cerveau ou à une lésion du nerf auditif » En un mot : le tintouin est acouphène. Nos yeux s’écarquillent, nos mâchoires se relâchent, abasourdies par une telle découverte. Se rendait-il compte, ce bon Pierre Furetière, à quel point il aiderait ma démonstration aujourd’hui ?
En outre, mes confrères oto-rhino-laryngologistes vous le diront, un moyen sûr de vous rendre un jour victime d’acouphènes est d’exposer vos oreilles sans protection à une trop violente explosion. Or, observons les lettres de tintouin qui subsistent après le retranchement d'inouï qui faisait office cette fois-ci de tampon auriculaire, je vous le donne en mille, attention reculez-vous, ça peut-être dangereux : t.n.t !
D’aucuns critiqueront la dernière étape de ma démonstration qui bouleverse l’ordre des lettres pour qu’apparaisse le nom de l’explosif. C’est vrai. Mais je vous réservais une petite surprise pour la fin car, une fois l'ordre rétabli, dans la suite de consonnes t.t.n, « Tais tes haines ! » se love une magnifique invitation à la paix.
CQFD