Quand un nom m’échappe, j’enfourche l’hippocampe qui loge dans mon cerveau et me mets illico à sa recherche dans les épaisses broussailles de mes neurones. Rares sont les termes qui, après une impitoyable traque, parviennent encore à se terrer et se taire. Car mon hippocampe a un flair redoutable. Il est tout à la fois, ma monture et mes chiens. Tenace, il ne supporte pas d’être mis en échec. Ou plutôt entêté, puisque mon hippocampe a établi son camp dans ma tête et n’en sort plus désormais.
L’autre jour, par exemple, mon hippocampe a su débusquer de très vieilles connaissances, femelles du sanglier et du lièvre, enfouies depuis belle lurette sous une chape d’oubli et, semblait-il, à l’abri du danger pour très longtemps encore – elles vivent d’ailleurs paisiblement dans bien des cerveaux, lesquels se soucient peu de les appeler par leur nom ? Après avoir sellé et bridé mon hippocampe, je me lançai à la poursuite des deux fugitives jusqu’à les cueillir enfin, l’une après l’autre, d’hase à laie.
Bien sûr, je fus bien incapable ensuite de savoir ce que j’allais pouvoir faire de ces deux noms sinon les inviter dans ce petit texte et les changer en fleur…